Devrais-je investir dans Carrefour ?

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Quand vous sortez de chez vous, quels sont les endroits dans lesquels vous vous rendez le plus souvent ? Votre cinéma préféré ? Votre bar de quartier ? Votre lieu de travail ? On pourrait très probablement ajouter les supermarchés à cette liste. Après tout, vous devez acheter de la nourriture tous les jours. Mais au-delà de la seule alimentation, vous pouvez aussi y acheter tout ce dont vous avez besoin pour prendre soin de vous et de votre maison. En gros, tous les produits dont vous avez besoin au quotidien.

Parmi les plus importants représentants de la grande distribution, on retrouve en France le groupe Carrefour. Au cours des dernières années, la chaîne d’hypers et de supermarchés s’est largement développée à l’international, avec plus ou moins de succès. Mais, à l’heure des changements de mode de consommation, et de l’arrivée de nouveaux acteurs dans le secteur de la grande distribution, comme Gorillas ou Flink, est-il toujours intéressant d’investir dans Carrefour ?

Comment évolue le cours de l’action de Carrefour

Si vous aviez investi dans Carrefour au début de l’année 2010, vous n’auriez pas fait une bonne affaire. 1 000 euros investis dans l’entreprise à cette époque vaudraient aujourd’hui près de moitié moins, soit aux alentours de 560 euros. Une évolution à l’opposé de l’indice de référence français, le CAC 40, qui a lui augmenté de 66% sur la même période. Sur cette période, Carrefour s’est donc moins bien comporté que l’ensemble des plus grandes entreprises françaises cotées en bourse, et il en va de même au cours de la dernière année, puisque le cours du géant de la grande distribution a progressé de de 13% contre 40% pour l’ensemble du CAC 40.

Évidemment, ces résultats ne prennent pas en compte les dividendes que Carrefour reverse à ses actionnaires et constituent une estimation approximative de l’argent que ceux-ci gagnent ou perdent quand ils investissent dans l’entreprise. 

Les résultats mitigés en bourse veulent-ils dire que Carrefour est une entreprise qui va mal ? Pour en savoir un peu plus, allons jeter un œil dans le rapport sur les bénéfices du géant de la grande distribution.

Comment calculer la performance d’une entreprise de la grande distribution ?

Avant de nous plonger dans les comptes de Carrefour, prenons un instant pour expliquer une des données les plus importantes quand on parle de grande distribution : la croissance à périmètre constant (ou LFL pour Like For Like en anglais). Pour faire simple, cet indicateur permet de mesurer l’évolution des ventes d’une entreprise d’une période à une autre en ne prenant en compte que celles réalisées avec les magasins qui étaient ouverts lors de la période de référence.

Concrètement, imaginez que vous soyez à la tête d’une chaîne de magasins et en possédiez 100 sur le territoire français. Vous avez eu une bonne année et avez racheté un de vos concurrents qui possédait 25 magasins en France. Vous en avez maintenant 125. Pour calculer votre croissance à périmètre constant d’une année sur l’autre, vous n’allez prendre en compte que les ventes réalisées dans les 100 magasins que vous possédiez déjà, en excluant les 25 que vous avez acquis. Cet indicateur permet aux investisseurs d’avoir une vision plus claire de la performance réelle de l’entreprise, hors croissance externe.

Comment Carrefour gagne de l’argent 

L’indicateur de croissance à périmètre constant nous intéresse d'autant plus dans le cas de Carrefour, qu’il nous permet d’affiner l’analyse que l’on peut faire du dernier trimestre de l’entreprise. En se basant uniquement sur l’évolution des ventes du grand distributeur, on observe que celles-ci ont crû de 4% entre le 3ème trimestre 2020 et la même période en 2021. Mais si l’on s’en tient à la croissance à périmètre constant, alors celles-ci n’ont augmenté que de 0,8% entre les Q3 2020 et 2021. La croissance de Carrefour est en fait tirée par sa politique d’expansion (+1,7%) et la vente d’essence (+2%).

Carrefour est présent dans neuf pays avec des magasins disséminés en France (49% du chiffre d’affaires du groupe), ailleurs en Europe (Espagne, Italie, Belgique, Pologne et Roumanie et 28% du chiffre d’affaires), en Amérique du Sud (Brésil et Argentine et 19,5% du chiffre d’affaires) et en Asie à Taïwan où Carrefour réalise 3,5% de son chiffre d’affaires global. 

Encore une fois, si l’on se fie uniquement à l’évolution globale des ventes de l’entreprise, celles-ci augmentent sur tous les continents. Cependant, en se concentrant sur la croissance à périmètre constant de l’entreprise, les ventes de Carrefour n’ont progressé qu’en Amérique du Sud où elles ont crû de 7,3%, tandis qu’elles ont chuté dans les autres zones d’activité du groupe (-0,3% en France, -1,2% dans les autres pays européens et -5,2% à Taïwan). Cela s’explique en grande partie par la pandémie de Covid-19 qui a fortement impactée le groupe.

Quel futur pour Carrefour ?

Comment Carrefour peut-il se relever de cette mauvaise passe et faire face aux défis qui s’annoncent ? Une première piste pourrait être à chercher du côté de l’augmentation des ventes en ligne du groupe. Celles-ci ont progressé de 19% dans le secteur alimentaire entre le Q3 2020 et celui de 2021 et même de 100% entre 2019 et 2021. 

La réduction des coûts est une des priorités du groupe. Un des principaux axes de la stratégie actuelle de Carrefour est de se désengager de plus en plus de ses magasins, soit en les vendant, soit en les franchisant, et ce principalement en Europe. Lors du troisième trimestre 2021, le groupe a vendu 7 de ses hypermarchés espagnols pour un montant de 93 millions d’euros. En Italie, plus de 50 magasins du groupe ont été franchisés depuis le début de l’année, tandis qu’en France 10 hypermarchés et 44 supermarchés ont connu le même sort. Cette tendance devrait se confirmer en 2022, puisque Carrefour a déjà annoncé la mise en franchise de plusieurs de ses enseignes en Europe.

L’avenir de Carrefour pourrait enfin passer par un rapprochement du groupe avec un de ses concurrents. Au cours de l’année, plusieurs tentatives de fusions ou de vente de Carrefour ont échoué. En janvier, le groupe canadien Couche-Tard avait tenté d’acquérir Carrefour, avant que le gouvernement français ne s’y oppose en mettant en avant un risque supposé pour “la souveraineté alimentaire” française. Début octobre, un deal avec l’enseigne de grande distribution française Auchan tombait à l’eau en raison d’un désaccord dans l’évaluation des groupes. 

Carrefour fait donc envie aux autres géants de la grande distribution et la structure de son actionnariat pourrait bien évoluer dans les mois ou années à venir. De possibles futures offres publiques d’achat pourraient signifier une future possible bonne affaire pour les actuels actionnaires de Carrefour, dont les actions seraient probablement rachetées à un montant plus important que celui qu’elles vaudraient au moment de l’OPA. D’ailleurs, la majorité des analystes donnent actuellement une note d’achat à l’action Carrefour. Sur 19 analyses compilées par Market Screener, 15 considèrent que l’action de l’entreprise est actuellement sous-évaluée.

Au final, investir dans Carrefour revient à se demander si le groupe parviendra à se redresser après la pandémie de Covid-19, mais aussi à envisager une future vente de l’entreprise à un de ses concurrents. La décision d'investir, comme toujours, vous appartient.

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